Le soir avant dîner j’écris ce poème:
Les derniers rayons du soleil
laissent vivre encore
le versant d’en face
jaune aride
au pied des monts de neigeIci le temps s’arrête
à six heures
en extérieurPas un brin qui vibre,
pas un caillou qui roule
oubliés de la lumièreMais entre les tentes qui fasseyent
le vent porte des mélodies pentatoniques
des odeurs d’oignon grillé
des heurts d’ustensiles en métal
parfois l’acrité du diesel qu’on brûle
et des murmures dans la langue de ces lieux
Puis le matin, après m’etre lavé le visage, j’écris:
Les nuages ont passé, avec cette crainte d’averse impromptue qui leur collait à la peau comme une mauvaise réputation.
Il n’y a plus que le soleil brûlant, sans masque et devant lequel rien ne se masque: vérité de la sueur pendant l’effort.
Et sur le versant d’en face, qui hier gardait comme une relique le soleil plus doux du soir, l’heure de dévoilement n’est pas encore venue: l’ombre – du relief, non des nuages cette fois – retarde l’heure.
Mais il me semble qu’aucun des deux poèmes ne dit ce qu’il doit dire: le premier passe sous silence la fatigue de la journée et l’altitude sans oxygène; le second omet l’enthousiasme du matin calme et la beauté des jeux d’ombre sur les sommets entourés de nuages immobiles et légers.
Pis encore, nulle mention des pancakes à la fleur d’oranger servis au petit-déjeuner.
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