L’express de Kansai Airport longe la baie d’Osaka. Quelques bateaux sur l’eau tranquille. Le soleil couchant embrase l’horizon de rose et d’orange.
Avant de monter, j’ai demandé la direction d’Osaka. Le plan du métro est un labyrinthe peuplé d’hiragana tordus sur eux-mêmes et de katakana à la raideur moqueuse. Je descends par hasard à la bonne station, j’entends ma correspondance, je prends le train pour la station Namba, au centre d’Osaka – si la ville en a un.
Dédale de couloirs souterrains, jalonnés de plans effrayants du quartier, que j’essaie, épisodiquement, de croiser avec mon pauvre Michelin, puis enfin j’émerge.
Modernité suffocante. Avenues assez larges pour qu’y procèdent neuf chars de front, bordées, encadrées de gratte-ciel recouverts d’écrans de publicité aux couleurs intrusives. Sur le trottoir large, parmi le flot, je prends la mauvaise direction, demande aux passants, redemande.
L’adresse de l’hôtel déjà est merveilleuse: 2-12-22 Nishi Shinsaibashi. Enfin je trouve un plan de quartier et je comprends, aux caractères chinois, que Nishi Shinsaibashi n’est pas une avenue, mais bien le quartier « ouest Shinsaibashi ». « 2 » indique la zone nord du quartier. Puis le chiffre suivant donne le pâté de maison. « 22 », enfin, est le numéro proprement dit. Je me rends compte plus tard dans la soirée que de petites plaques bleues près des portes indiquent ces adresses. En attendant, je mets a rude épreuve l’anglais de ceux que je croise sur mon chemin.
Enfin je trouve le fameux « Capsule Hotel Asahiplaza ». Backpackers. On se déchausse, chaussures dans un casier dont on échange la clef contre celle d’une capsule individuelle. Je pose mes affaires, je vais dîner. Ayant compris le fabuleux système (d’Amélie Poulain?) de numérotation des rues, je suis le Michelin dans un restaurant de nouilles succulentes: un bol de kitsune udon – soupe de nouilles couverte de deux gros morceaux de tofu frit, parfumé – me remet d’aplomb après une journée a 30 000 pieds.
Je rentre a l’hôtel. Sur le trajet, les ruelles du fameux quartier, orthogonales, retentissent de vie: restaus, bars, boutiques, et un flot de jeunes japonais qui s’exclament. Dans l’hôtel, je réserve mon logis pour le jour suivant, je me brosse les dents et je m’enfourne, au sens propre, dans ma capsule.
Un mètre de large et de haut sur deux de profondeur, les capsules sont alignées, sur deux niveaux, comme des cages à lapins vidées d’un laboratoire en faillite. L’ensemble est baigné d’une lumière statique. Je monte dans ma capsule et je rabats le store. Je règle mon réveil.
Il y a quelque chose de fœtal dans cet hébergement – pas fatal j’espère. Rangées de fœtus en sommeil. Mais je ne sais de quelle expérimentation nous sommes l’objet, ni dans quel dessein ce capsule hôtel nous cultive. Je m’assoupis comme une pierre.
Le lendemain, je prends ma douche dans l’antichambre d’un sauna que j’ai eu la flemme d’essayer la veille. Douches communes, assises, nues, sans pudeur. Les hôtes ôtent le pyjama beige fourni dans leur casier et passent sous la pomme de douche avant de se glisser dans l’eau brûlante. Au premier, on sert le petit-dèj. Je règle, me rechausse et me dirige vers le train pour Kyoto.
Très bon article foetal qui donne envie de connaître la suite du voyage !