Toute la journée, je marchais parmi la foule des visiteurs, autour du lac de Hangzhou, ou bien j’étais pris dans la frénésie du trafic – autobus, vélos, voitures, motocyclettes, piétons sur le champ de bataille.
4 millions d’habitants. 40 millions de visiteurs par an.
A l’heure où les lions vont boire, ici il fait nuit. A un coin de rue de la rue touristique Hefang Lu, j’avise un escalier en pente raide, qui enrobe une colline surplombant le quartier. Je la gravis lentement. Le chemin serpente entre les camphriers, qui atténuent la clameur de la circulation. Je croise des promeneurs épars; pour quelques couples, c’est l’heure du taichichuan sous la veille des petites pagodes. J’atteins bientôt un temple qui coiffe la colline, hauts murs, portes closes. Le chemin se poursuit sur terrain plat.
Soudain, place du village. Deux boui-bouis, quelques tables, des joueurs de cartes et de dominos, à l’ombre des camphriers séculaires. Cliquettement saccadé des dominos, exclamations, rires à toutes les tables. Le « restaurateur » a fait son comptoir d’un meuble rustique; il en sort un menu crasseux; j’opine à ce qu’il me suggère et je m’attable.
A la table voisine, deux jeunes couples rient bruyamment. Un fatras de verres s’y empile, à côté de de bols, de bouteilles à moitié vides, d’assiettes, d’emballages, de plats à demi finis. Au moment de partir – deux par deux – l’une des jeunes femmes, en jupe rayée marine et blanc (la mode à Hangzhou?) trébuche et rit; l’autre a les cheveux haut relevés sur le front.
La place pavée de grandes dalles est cernée par les ombres des camphriers, immobiles dans le soir. Derrière, on devine les hauts murs d’un temple, le dessin de ses toits courbes, la densité de son silence. Le murmure de la ville semble lointain, décalé. Ou plutôt ce lieu sans agitation, à taille humaine, est-il hors de propos !
Ma soupe de nouilles au boeuf ingérée, je m’attarde. J’écoute la musique de ces paroles que je ne comprends pas.
Au moment de partir, je passe devant quatre hommes qui boivent et rient entre deux parties de cartes.
Je tâche de ne pas les déranger.